17 / 1/ 2016 – 30/5/2018
L”Amérique Latine et le Libéralisme
Made in Great Britain
Le libéralisme prôné par la Grande Bretagne concernait principalement la libéralisation des échanges commerciaux des pays tiers afin de mettre fin a la domination prohibitionniste ibérique et coloniale. Dans de tels défis, la concurrence internationale et les mutations du centre de pouvoir et le déplacement des principales routes maritimes du commerce, la France est devenue plus isolée et restreinte dans les limites de sa propre décadence régionale.
De telles manipulations du marché financier ont été l’une des forces qui ont imposé à la Chine, grâce à l’Opium War, l’ouverture de son marché intérieur au bénéfice exclusif des classes européennes et impérialistes.
L’Argentine, le Brésil, le Chili et le Pérou ont joué un rôle prépondérant dans la redéfinition des termes du marché international des produits financiers, des matières premières et des matières primaires (matières premières et ressources naturelles). Cette restructuration d’ordre libérale prit la relève de la période mercantiliste qui fut l’oeuvre en premier par l’Espagne et le Portugal. Les luttes d’indépendance entreprises par les classes oligarchiques et des propriétaires terriens en Amérique Latine furent aussi stimulées par l’indépendance acquise par les colonies britanniques du nord, a savoir les Etats Unis.
La Grande-Bretagne mèna dans d’autres endroits de ce monde comme intégration forcée dans le système du crédit international et des transactions internationales selon les directives de Londres en tant que nouveau centre financier mondial. Ces nouvelles opérations et politiques bancaires internationales étaient basées sur le principe britannique selon lequel les pays peuvent recevoir toute la dette extérieure ou l’investissement direct étranger qui rédigera et libellera en papier alors que leurs paiements des intérêts et des principaux concernés devraient être versés à London Financiers uniquement En or. Désormais, les pays n’étaient pas en mesure de payer une partie de cette spirale de la dette extérieure qui a été augmentée en raison du prix plus élevé qu’ils ont dû payer en or pour acheter des produits manufacturés et le faible paiement et l’évaluation qu’ils ont reçus dans le papier pour la vente de leurs matières premières et produits primaires .
Entre 1830 et 1912, le destin de l’Afrique a été décidé dans les intrigues, les complots, les actes cachés et également scellés dans les trahisons. En Europe, des changements institutionnels irréversibles ont eu lieu. En France, Louis-Napoléon Bonaparte devint le seul président (1848-52) de la Deuxième République française et, comme Napoléon III, l’Empereur (1852-70) du Second Empire français. Appuyé comme l’Empire français, la politique coloniale devait légitimer une telle dénomination et effectivement, Napoléon III a doublé la région de l’empire français d’outre-mer en Asie, dans le Pacifique et en Afrique.
Des soldats des colonies africaines ont été utilisés pour assujettir et mettre en œuvre une politique de «terre brûlée» et la famine pour imposer la volonté coloniale des élites parisiennes. Ce genre d’infanticide et de guerres de procuration a laissé des stigmates profondes d’origine importés et plus tard incorporés aux souvenirs et aux personnalités de l’Afrique, comme ils ont tous exagéré le malentendu local et régional, exacerbé les antagonismes ethniques et augmenté la convoitise et l’exploitation de l’Afrique par l’Occident avec la bénédiction d’alliés et de collaborateurs locaux.
L’Afrique ayant été déjà la proie de la décadence de la France et de la prééminence de la Marine de guerre britannique et de la combinaison des troubles internes internes et des instabilités telles que les conséquences directes de la Révolution française, la double défaite et le renvoi de l’Etat napoléonien.
Au sein de ces changements et impacts radicaux, les élites françaises, la Grande Bourgeoisie, ont réintégré la notion d’Empire en remontant au pouvoir l’orléaniste contre les légitimistes «Bourbon» en préconisant l’intronisation de Louis-Philippe comme «Roi de France» Vagabond qui est devenu roi avec des sons sociaux en défendant et en permettant l’invasion de l’Algérie en tant que geste royal pour stimuler une cohésion sociale autour de lui avec des slogans nationalistes et religieux et de la propagande et c’était en 1830. La France avait ouvert une pandore en introduisant ses problèmes sociaux internes.
Ce mouvement de la bourgeoisie coloniale française nouvellement émergée était effectivement une stratégie émulée de ce que la Grande Bretagne poussant la bourgeoisie France a multiplie ses actions militaires a l’extérieur pour ne pas être marginalisée de cette concurrence élitiste et inter-bourgeoise de l’Europe de l’ouest. D’autre part, l’intervention de son armée au Mexique, qui visait à créer un deuxième empire mexicain sous la protection française, avec Maximilien et Charlotte s’était soldé par une aventure désastreuse. Pendant ce temps, l’Afrique a été transformée d’un réservoir pour le commerce transatlantique esclave en un encadrement militaro-bureaucratique européen visant l’exploitation des ressources naturelles et humaines. Cette modification des approches a également été mise en œuvre avec les conditions difficiles d’une politique coloniale défendue et louée par les impérialistes occidentaux comme apportant la modernisation et la civilisation aux peuples indigènes et primitifs des pays et des pays tiers.
La France a sauté sur le fond du wagon britannique et a donné son manque de préparation Et la tendance opportuniste à une telle conversion prétentieuse soudaine, l’Allemagne et d’autres pays européens ont estimé que leurs parts n’étaient pas adéquates à leur taille réelle d’importance à l’échelle mondiale et à l’intérieur de cette nouvelle trésorerie impérialiste négociée en leur présence.
Cette inter-rivalité entre les conceptions impérialistes naissantes et existantes, malgré toutes les Conférences tenues de Berlin à Algesiras a été l’une des principales raisons de l’avènement de la Première Guerre mondiale. Cette conflagration internationale avait imposé à la France de saisir et de coller ses ongles et ses dents sur l’Afrique compte tenu des nouveaux défis puissants auxquels la France était confrontée, même de son allié temporaire et conjoncturel, l’autre Dracula impérialiste qui était la Grande-Bretagne Financiers et les Impériaux.
Dans le cadre d’une politique coloniale qui vise même à renverser les autorités locales et les régimes et les remplacer par des marionnettes et des collaborateurs locaux, il est devenu le cas en Tunisie et plus tard au Maroc en 1912. De même, le continent africain, comme le Maroc, était dans le meilleur des cas présenté comme des terres exotiques, naturelles, vierges et inexploitées dans le but d’attirer les colons. Alors que l’Afrique subsaharienne devient la terre de la conversion et l’espace pour ceux qui croyaient en transférer par le christianisme la lumière du savoir, de la civilisation et du progrès. C’est ainsi que l’Europe impériale a considéré l’Afrique et promet à ses gens qu’en adaptant les approches liturgiques chrétiennes elles seront extraites de leur état léthargique, elles seront récompensées et acquerront des caractéristiques communes aux sociétés plus développées.
L’évolution de cette relation ethnocentrique et dégradante associée qui ont été classés par de nombreux auteurs et analystes contemporains comme étant exploitants et étant la raison de toutes les difficultés et problèmes qui sont devenus les obstacles à un véritable développement non seulement de l’Afrique mais pour l’ensemble des pays du tiers monde.
Le Mal-Développement et le sous-développement dans leur majorité ont donné leurs premiers pas sur le marché international et ont même développé leur propre faiblesse au sein du berceau du Monde occidental capitaliste et impérialiste.

L’Afrique française du Nord (1830-1962)
L’ALGÉRIE
Quelques mois après la prise d’Alger le 4 juillet 1830, un premier poste de douane est créé dans la ville. À partir de 1832, chaque province (Alger, Oran et Bône) est dotée d’une direction des douanes ; en 1848, elles deviennent des inspections auxquelles se joint celle de Philippeville. Les agents sont rattachés au Ministère des Finances et soumis au statut de leurs collègues métropolitains, alors que le reste des douaniers d’Afrique dépendent jusqu’en 1894 du Ministère de la Marine et des Colonies. La création des Gouvernements Généraux dans chaque grande aire coloniale en 1898, va mettre un terme aux fonctions de directeur général des douanes d’Algérie. Toutefois, les douaniers algériens continuent de dépendre du cadre métropolitain, excepté les agents des brigades au-dessous des grades de sous-officiers, qui appartiennent au cadre algérien et ne peuvent pas servir en dehors de cette colonie. L’organisation hiérarchique reste calquée sur celle de la métropole. De six cent cinquante agents au début de la IIIe République, l’effectif de la douane algérienne passe à huit cent soixante-quinze en 1914 puis à mille cent à la fin des années 1930. Il devient en effet nécessaire de mieux surveiller les frontières orientale (montée du nationalisme en Tunisie) et occidentale résistances face à la colonisation du Maroc, zone jusqu’alors sous contrôle international). Grâce au développement du réseau routier et ferroviaire et au défrichement des terres, l’Algérie peut exporter ses produits : céréales, produits de la vigne, fer et phosphate, sur lesquels sont appliqués les tarifs de l’union douanière de 1892.
LA TUNISIE ET LE MAROC
En 1881, la Tunisie est placée sous protectorat français ; un ministre résident français est à la tête d’un gouvernement qui associe ministres français et tunisiens. Le Maroc, dont la conquête sera longue pour les territoires méridionaux, est aussi sous le même régime à partir de 1912 ; des accords internationaux éliminent cependant toute tentative de protection douanière sur le Maroc. Dans ces deux colonies, à l’instar de l’Algérie, des douanes “nationales” sont mises en place mais selon le modèle français. Au fur et à mesure, le recrutement d’agents locaux, principalement des Européens, met un terme progressif à l’envoi d’agents métropolitains.

Carte postale, années 1910
Carte postale, années 1910, collection du MND, n°inv 996.127.1
Tanger, Maroc – La Douane, Edition spéciale des Magasins Modernes

Carte postale, 1907
Carte postale, 1907, collection du MND, n°inv 996.118.1 Occupation d’Oudjda, Maroc, en avril 1907.
Bab-el-Khémis, entrée principale de la ville gardée par les Zouaves, Éditions Boumendil

Carte postale, vers 1907-1913
Carte postale, vers 1907-1913, collection du MND, n°inv 996.117.1
Casablanca, Maroc – La nouvelle Douane

Carte postale, vers 1907-1911
Carte postale, vers 1907-1911, collection du MND, n°inv 996.120.1
Casablanca, Maroc – La Douane, photographie: Pierre Grébert

Carte postale, vers 1902-1905
Carte postale, vers 1902-1905, collection du MND, n°inv 998.6.76
Alger, Algérie – La Douane, Éditions P. Satragno

Carte postale, entre 1890 et 1905
Carte postale, entre 1890 et 1905, collection du MND, n°inv 996.119.1
Bône, Algérie – La direction des douanes, Éditions Neurdein

L’Afrique française du Nord (1830-1962)
Extrait issu de L’ “Atlas colonial français, colonies, protectorats et pays sous mandat”, P. Pollachi.
Paris, L’illustration, 1929.

Photographie argentique, 1912
Photographie argentique, 1912, collection du MND, n°inv A6689 Tunis, Tunisie – Recette principale des douanes

Photographie argentique, 1913
Photographie argentique, 1913, collection du MND, n°inv A5805.
Tunis, Tunisie – Brigade des douanes.
Economie politique du subcapitalisme en Amérique latine (1830-1930) : Argentine-Brésil-Chili-Pérou
Auteur : | Said El Mansour Cherkaoui; Université de la Sorbonne Nouvelle (Paris). |
---|---|
Éditeur: | Paris : [s.n.], 1992. |
Dissertation: | Thèse de doctorat : Études de l’Amérique latine : Paris 3 : 1992. |
Édition/format: | Thèse/dissertation : Thèse/mémoire : Français Voir toutes les éditions et tous les formats |
Évaluation: | (pas encore évalué) avec des critiques – Soyez le premier. |
Sujets | Économie politique — Amérique latine — Thèses et écrits académiques.Capitalisme — Amérique latine — Thèses et écrits académiques.Conditions économiques — Amérique latine — 19e siècle — Thèses et écrits académiques. Voir tous les sujets |
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A cette date, 57 ans après l’indépendance, la France sécurise l’accès aux marchés dans ses 14 anciennes colonies en Afrique. Les bénéfices sont de nature commercial: l’accès aux ressources et aux marchés. Les mécanismes pour appuyer cela sont une monnaie partagée (le franc CFA), la présence militaire, la diplomatie secrète et la commercialisation de sa langue. Mais … le changement est en hausse.
Mehdi Michbal | LE 23-07-2020 19:33
Défaite d’Isly, affaiblissement militaire du Maroc, rebellions dans blad Siba, conférence d’Algésiras, occupation d’Oujda par Lyautey… Dans les manuels d’histoire du Maroc, le protectorat français est expliqué par plusieurs événements militaires et politiques qui ont marqué l’histoire du Royaume Chérifien et celles des puissances coloniales de l’époque, l’Espagne, la France, l’Angleterre ou encore l’Allemagne. Mais rares sont les références historiques qui ont tenté d’analyser cette période de l’histoire sous un angle purement économique.
C’est l’exercice auquel s’est prêté le chercheur franco-marocain Adame Barbe dans un mémoire de master soutenu en 2016 à l’Ecole d’Economie de Paris sous la direction de l’économiste Thomas Piketty. Un mémoire qu’il vient de publier au Maroc dans un essai titré : « Dette publique & impérialisme au Maroc (1856-1956) », (Editions de la Croisée des Chemins, 90 DH).

Paru aux Editions de la Croisée des Chemins, un livre de l’économiste franco-marocain Adam Barbe analyse comment la dette publique a été la principale arme dans l’entreprise coloniale française au Maroc. Un livre qui refait l’histoire du protectorat, mais qui reste très d’actualité dans le contexte actuel où la dette extérieure reste toujours perçue comme un synonyme de perte de souveraineté.

La thèse d’Adame Barbe (normalien, diplômé de la Paris School of Economics et de l’Inalco et titulaire de trois licences de la Sorbonne, en économie, en sociologie et en histoire) tente de démontrer qu’au-delà des évolutions politiques, diplomatiques et militaires de l’époque, la dette imposée au Maroc par les puissances coloniales a été une des principales armes qui a conduit à sa colonisation et à la signature du traité du protectorat avec la France en 1912.
L’auteur ne fait pas de la dissertation historique mais se base sur des données statistiques et économiques tirées des archives des banques françaises, du Quai d’Orsay et d’autres institutions européennes pour étayer son récit.
Encadrant d’Adame Barbe dans ce travail de recherche, l’économiste Thomas Piketty connu pour ses thèses sur les inégalités sociales dans l’Histoire décrit ainsi la démarche de l’auteur :
« Le livre d’Adam Barbe décortique avec précision et justesse la mécanique des “traités inégaux” qui permit aux puissances coloniales de prendre le contrôle de nombreux pays et actifs étrangers, et montre avec le cas du Maroc le fonctionnement de cette logique. Le scénario typique était le suivant. On commençait par se saisir d’un prétexte plus ou moins convaincant (le refus d’ouvrir suffisamment les frontières, ou bien une émeute contre des ressortissants européens ou le besoin de maintenir l’ordre) pour monter une opération militaire, à la suite de quoi on exigeait des privilèges juridictionnels et un tribut financier, qui pour être repayé conduisait à la prise de contrôle de l’administration des Douanes, puis de l’ensemble du système fiscal, afin d’en améliorer le rendement au bénéfice des créditeurs coloniaux (tout cela avec des impôts lourdement régressifs, ce qui générait de fortes tensions sociales, et parfois de véritables révoltes fiscales contre l’occupant), et finalement à la mainmise du pays dans son ensemble ».
C’est cette histoire du protectorat revue sous un angle nouveau que l’on découvre ainsi, avec le menu détail, dans le livre d’Adame Barbe. Un récit d’histoire économique qui mérite d’être lu, enseigné et qui reste toujours d’actualité…
Comme l’a montré le PAS imposé par le FMI au Maroc dans les années 1980 ou encore les conditions draconiennes qu’exigent toujours les bailleurs de fonds internationaux au Maroc, en termes de gestion budgétaire et monétaire, et de réformes libérales à mettre en place pour s’assurer du remboursement de la dette. Les objectifs changent, mais l’esprit du mécanisme de la dette reste le même, comme le souligne à juste titre Piketty dans sa préface :
« Même si les mécanismes de justification et les formes de pression ont évolué, on aurait tort de s’imaginer que ces mœurs rugueuses entre puissances étatiques ont totalement disparu, et que les rapports de force ne jouent plus aucun rôle dans l’évolution des positions financières des pays (…) Ce n’est pas le moindre mérite d’Adam Barbe que de nous faire revivre les différentes étapes des logiques indissociablement financières et politiques qui ont conduit à la colonisation du Maroc, et de nous rappeler que la finance et la dette publique sont, et seront toujours, des enjeux de souveraineté et de pouvoir. »
A l’origine du surendettement marocain
Pour analyser l’effet de la dette publique sur l’indépendance du Maroc, Adame Barbe est remonté au milieu du 19e siècle, pour essayer de comprendre comment le Royaume est tombé dans le piège de cette stratégie impérialiste.
L’auteur constate que l’endettement du Maroc découle de deux principales raisons : les défaites militaires par lesquellesle gagnant impose au perdant une sorte d’indemnité de guerre. C’est le cas, recense-t-il, des dettes de guerre nées des confrontations militaires avec l’Espagne en 1860 et 1894 et avec la France en 1907. Et un second type de dette lié lui aux crises économiques qui ont jalonné l’histoire du Maroc durant cette période. C’est le cas des emprunts de 1904 et de 1910 qui ont fait perdre au Maroc toute souveraineté sur son économie et la gestion des finances publiques et ouvert au passage la voie à l’ingérence française et à la signature du traité du protectorat.
Adame Barbe inverse ainsi la lecture historique de l’impérialisme. « Plutôt que de le comprendre comme un intérêt économique qui motive la conquête coloniale, il s’agit de considérer l’outil économique comme arme de conquête coloniale », écrit-il.
Les visées impérialistes des Européens sur le Maroc commencent avec la bataille d’Isly (1844), qui représente un tournant majeur dans la relation entre le Royaume et les puissances occidentales. «Si au XVIIIème siècle, Moulay Ismaïl (1672 – 1727) pouvait traiter d’égal à égal avec Louis XIV (1643 – 1715), l’équilibre des pouvoirs ne résista pas à la révolution industrielle. La défaite marocaine du 14 août 1844 près de l’Oued Isly est un tournant majeur dans l’histoire du pays. Elle révéla l’archaïsme de l’armée marocaine, désormais incapable de résister au choc d’une armée européenne moderne. De fait, depuis la Bataille des Trois Rois (4 août 1578), le Maroc était vu comme un empire puissant à respecter. Cette faiblesse militaire nouvellement reconnue transforme les relations commerciales entre le Maroc et l’Europe », écrit Adame Barbe.
Cette défaite ouvre la voie à la signature de plusieurs traités commerciaux avec les pays européens, « une ouverture forcée du Maroc » qui constitue le premier acte d’empiètement sur sa souveraineté. C’est le cas du traité conclu avec le Royaume-Uni en 1856 : il définit par exemple un tarif douanier sur les importations (10%) et les exportations, et interdit aux autorités du Royaume de modifier des taux ou de créer de nouvelles taxes. Le traité contraint également le sultan à démanteler certains de ses monopoles. S’en suivent alors plusieurs autres traités : les Pays-Bas en 1858, la Belgique (1862)…
En plus des avantages commerciaux, ces traités accordent aux Européens des droits de protection et nombreux privilèges administratifs les exemptant d’impôts et les protégeant de la justice marocaine.
Le coup de massue sera la défaite face à l’armée espagnole en 1860 et l’occupation de Tétouan. Si la Grande Bretagne est intervenue pour empêcher l’avancée des Espagnols, cette défaite génère pour le Maroc une indemnité de guerre de 100 millions de francs-or. Il s’agit, relate Adame Barbe, du premier exemple dans l’histoire moderne du Maroc d’une dette infligée à la suite d’une défaite militaire. « Cette compensation doit être entièrement payée avant décembre 1860, et Tétouan reste occupée par les troupes espagnoles tant qu’elle ne serait pas remboursée. L’ampleur de cette dette est considérable : elle représente près de 25% du PIB du Maroc, tandis que le Trésor marocain ne possède que 40% de la somme requise », retrace-t-il.
Les Britanniques, qui ont des intérêts commerciaux à protéger au Maroc, négocient en 1861 un retrait de l’Espagne de Tétouan. Mais pour permettre au Maroc de payer l’indemnité de guerre, les Britanniques octroient au Royaume un prêt de 17,5 millions de francs-or, à un taux d’intérêt de 5%, transformant dès lors une simple indemnité de guerre en engagement financier à long terme.
Pour s’assurer du remboursement de leur emprunt, des fonctionnaires britanniques sont dépêchés au Maroc pour prélever directement auprès des douanes le montant des échéances qui tombaient deux fois par an.
Mais le Maroc arrive à mettre vite fin à cette ingérence britannique, raconte Barbe : « En 1861, le Maroc a encore probablement les ressources nécessaires pour faire face aux puissances européennes. Le service de la dette dû aux Britanniques n’était qu’un fardeau modéré pour les revenus douaniers, puisqu’il n’en représentait que 12% (…) C’est ainsi que l’emprunt britannique est remboursé de façon régulière jusqu’en 1882, date à laquelle les fonctionnaires britanniques quittent le Maroc ».
Malgré le poids de cette dette qui représentait 25% du PIB du Maroc en 1860 et l’équivalent de six années d’exportations, le Maroc est arrivé à la rembourser. Mais cela ne s’est pas fait sans dégâts, puisque les remboursements en monnaie étrangère, couplés à l’ouverture tous azimut au commerce extérieur, ont produit un lourd déficit de la balance commerciale du pays. Ce qui a ouvert la voie à de nouvelles levées en monnaie étrangère pour combler le déficit… Le Royaume entrera dès lors dans une spirale de dette qui débouchera quelques années plus tard sur le protectorat.
Les déficits jumeaux qui précipitent le Maroc dans la spirale de l’endettement
Pour comprendre la situation de surendettement du Maroc dès le début du 20e siècle, Adame Barbe analyse dans un chapitre du livre la structure des finances publiques et des échanges commerciaux du Maroc à la fin du 19e siècle. Il en conclut que le Royaume, du fait de son ouverture commerciale, n’était pas arrivé à s’intégrer dans la « mondialisation », ses exportations n’arrivant plus à couvrir ses importations massives.
Idem pour le budget public, qui souffrait d’un déficit chronique du fait d’un système fiscal archaïque et de l’opposition des oulémas à toute tentative de réforme fiscale qui visait à remplacer l’impôt islamique traditionnel par une fiscalité moderne. Mais aussi de la succession des sécheresses, des famines et des épidémies qui empêchaient tout relèvement de l’impôt, et ont fait rentrer le pays dans une profonde crise économique.
Ces différents éléments poussent le Royaume à contracter plusieurs dettes à la fin du 19e siècle, qui sont toujours assorties par des concessions douanières et des privilèges commerciaux au créanciers européens.
Une situation qui durera jusqu’en 1904, date à laquelle la France négocie avec l’ensemble des créanciers du Maroc un rachat de la dette marocaine en octroyant un méga emprunt de consolidation au Royaume, par le biais d’un consortium bancaire conduit par Paribas. Pour Barbe, c’est cet emprunt qui assoit la suprématie de la France sur le Maroc.
« L’emprunt 1904 constitue une rupture historique majeure dans l’histoire contemporaine du Maroc. Il prive définitivement le Maroc de sa souveraineté économique à travers la saisie des revenus douaniers nécessaires au paiement de sa dette et prévoit l’établissement d’une administration française au Maroc huit ans avant le Traité de Fès ».
Le contrat de l’emprunt est signé le 12 juin 1904 par le ministre marocain des Affaires étrangères, Si Abdelkrim Ben Slimane, le ministre marocain des Finances, Si Mohammed Tazi et M. Zangarussiano qui représente Paribas. Le capital nominal de l’emprunt émis s’élève à 62,5 millions de francs, divisé en 125.000 obligations de 500 francs chacune, sur lesquels est appliqué un taux d’intérêt annuel de 5%.
La principale caractéristique du contrat d’emprunt est qu’il est garanti par le revenu des douanes, à l’instar de l’emprunt britannique de 1861. Dans l’éventualité où celui-ci serait insuffisant pour assurer à lui seul le service de l’emprunt, il est prévu que le consortium bancaire puisse percevoir tout autre revenu de l’État. Un délégué français est présent dans chaque port marocain, et doit prélever 60% des douanes perçues chaque jour.
Lorsque la somme nécessaire pour assurer six mois du service de la dette est collectée, le prélèvement s’arrête jusqu’au début de la période suivante. L’amortissement de l’emprunt commence le 1er juillet 1906 et aurait dû s’arrêter le 1er juillet 1941, avant qu’il ne soit remboursé par anticipation en 1929.
Pour Adame Barbe, le gain le plus important véritablement perçu par le consortium bancaire français ne réside pas dans les profits immédiats réalisés à l’émission. Les privilèges obtenus sont bien plus précieux. Le consortium a remporté l’exclusivité du droit d’émission des emprunts futurs au Maroc, et le royaume s’est engagé à lui confier la création d’une Banque d’État du Maroc (devenue Bank Al Maghrib après l’indépendance).
« L’emprunt 1904 est un succès éclatant pour la France. En tant qu’emprunt de consolidation, il permet d’unifier l’ensemble des engagements financiers précédents du Maroc et de faire des banques françaises les uniques créancières du pays. La prépondérance française est assurée et affermie par de puissants liens financiers. L’emprunt 1904 est par ailleurs suffisamment important pour imposer un prélèvement régulier sur les douanes, mais en même temps suffisamment faible pour ne pas résoudre les embarras financiers du Makhzen. L’horizon de cet emprunt est de conduire le Maroc à en réclamer un suivant, plus important encore, qui immobiliserait l’ensemble des ressources fiscales du Maroc, exigerait une réorganisation administrative du pays, et accorderait des concessions de travaux publics aux entreprises françaises – en d’autres termes, un protectorat », écrit l’auteur.
De 5% du PIB en 1904, la dette extérieure passe à 40% du PIB en 1910
Le Maroc est définitivement conquis par les financiers français. Pendant les huit années qui s’écoulent entre 1904 et le traité du protectorat, l’endettement du Maroc continue de s’aggraver. De 5% du PIB en 1904, la dette publique marocaine passe à 40% du PIB en 1910.
Si le rapport au PIB paraît relativement faible comparé aux normes actuelles, un autre ratio montre bel et bien que cet endettement a étranglé le pays. Adame Barbe note ainsi que l’indicateur le plus représentatif pour approcher le fardeau de la dette marocaine est le rapport de cet endettement avec les recettes de l’Etat. En 1907 par exemple, l’endettement du pays représentait 16 années de revenus étatiques.
L’ingérence française au Maroc et les résultats de la conférence d’Algésiras de 1906 créent des tensions sociales et politiques au Maroc qui se sont manifestées par des troubles à l’ordre public. A l’image du meurtre du docteur Émile Mauchamp le 19 mars 1907 à Marrakech et du massacre de neuf ouvriers Européens le 30 juillet 1907 à Casablanca. Des évènements qui sont alors considérés comme un prétexte par la France pour intervenir militairement au Maroc. Lyautey occupe Oujda en mars 1907 tandis que Casablanca est bombardée en août 1907.
Suite à ces affrontements, la France exige du Maroc le paiement de nouvelles indemnités de guerre (76 millions de francs). Un nouvel emprunt est négocié dans la foulée qui aboutira à une levée de 101 millions de francs en 1910. Une dette montée comme en 1904 en un emprunt de consolidation par les banques françaises à un taux d’intérêt de 5%.
« L’amortissement de l’emprunt 1910 est plus long que celui de l’emprunt 1904 : il commence le 1er octobre 1911 pour ne se terminer que 74 ans plus tard. L’amortissement annuel atteint 5,2 millions de francs et était garanti par la totalité des revenus douaniers restants », précise Adame Barbe. « D’autres revenus s’ajoutent en outre à la garantie douanière : les revenus issus du monopole sur le kif et le tabac, les mostafadet (droits de marchés), les droits à l’entrée des ports, les revenus issus des propriétés de l’État et les taxes urbaines ». En d’autres termes, pratiquement tous les revenus de la fiscalité indirecte du Maroc sont désormais sous le contrôle de la France.
Au début de l’année 1911, l’ensemble du pays se soulève pour protester contre la situation. A nouveau, le Maroc ne peut que compter sur un nouveau prêt européen pour espérer maintenir l’ordre. «Mais cette fois-ci, il n’a plus aucune source de revenu à offrir en garantie aux Français. Le projet de prêt est abandonné dès mars 1911, et les troupes françaises occupent les principales villes du pays à la fin du printemps pour assurer elles-mêmes le maintien de l’ordre : le protectorat français est imminent ».
« Il aurait pu être établi dès cette année si les Allemands n’étaient pas une nouvelle fois intervenus, avec l’envoi de la canonnière SMS Panther dans la baie d’Agadir en juillet 1911. La crainte d’un conflit avec l’Allemagne pousse Joseph Caillaux, Président du Conseil, et Jules Cambon, Ambassadeur à Berlin, à négocier avec les Allemands et à leur céder le Cameroun en échange du renoncement à leurs intérêts marocains », note l’auteur. Un accord franco-allemand qui aboutira directement au traité du protectorat de 1912.
Dès cette date, la politique de la dette du Maroc sous protectorat français changera. Avec des montages et des objectifs nouveaux, pour assurer à la fois des revenus financiers aux banques françaises, Paribas à leur tête, et pour garantir à la France des revenus de sa nouvelle colonie.
Une stratégie de la dette qu’Adame Barbe analyse dans la deuxième partie de son livre et qui casse selon lui le mythe des « bienfaits de la colonisation » en démontrant que les différents investissements réalisés par la France au Maroc ont été financés par de la dette émise par des banques françaises et financés par le contribuable marocain… Une partie à laquelle nous consacrerons un article à part entière.
Protectorat. Révélations sur la politique de la dette française au Maroc
Source : Musée de Bank Al-Maghrib
Mehdi Michbal | LE 26-07-2020
Dans son livre « Dette publique & Impérialisme au Maroc (1856-1956) », le chercheur franco-marocain Adam Barbe raconte le rôle ambigu qu’a joué la France au Maroc par le biais de l’endettement public. Une thèse où il démonte le mythe du « rôle positif » de la colonisation, en démontrant que derrière les politiques d’équipement réalisées par la France se cachait bien souvent des intérêts purement mercantilistes.
Après avoir asphyxié le Maroc par l’endettement, la France a pris le contrôle du Royaume officiellement en 1912 après la signature du traité du protectorat. Un protectorat qui durera jusqu’en 1956, date de déclaration de l’indépendance du Maroc. Dans la majorité des récits historiques, on raconte que ces 44 années de domination française sur le Maroc ont permis de développer le Royaume, de le doter d’infrastructures (routes, ponts, chemins de fer, électricité, barrages…), de créer de nouveaux centres urbains, une administration moderne et ont jeté les bases de la construction de l’Etat marocain tel qu’on le connaît aujourd’hui.
Ce récit de la colonisation bienfaisante qui apporte aux pays colonisés prospérité, modernité et développement continue d’alimenter les débats actuels, comme le démontrent les polémiques houleuses nées après les déclarations de repentance faites par le président français Emmanuel Macron en Algérie en 2017 ou encore la tentative par le gouvernement français d’introduire par une loi de 2005 (abrogée en 2006 par décret) la promotion de l’enseignement du « rôle positif » de la colonisation dans les manuels scolaires.
Dans son livre « Dette publique & Impérialisme au Maroc (1856-1956) », publié aux Editions La Croisée des Chemins (90 DH), Adam Barbe apporte une réponse cinglante aux tenants de cette ligne du colonisateur bienfaisant, en démontrant que tout l’effort financier qu’a nécessité la politique de travaux publics et d’équipement a été porté par le gouvernement marocain, via des dettes publiques payés en dernier lieu par le contribuable marocain. La métropole, que l’on présente dans les récits historiques, comme ayant contribué à développer le Maroc par des aides financières et un grand effort d’investissement, a en vérité profité doublement du protectorat : les dettes portées par le Maroc ont été octroyés exclusivement par les banques françaises, Paribas à leur tête. Ce qui générait des profits financiers non considérables pour les prêteurs. Et ces dettes, mieux encore, alimentaient essentiellement les carnets de commande d’entreprises encore une fois françaises, contrôlés pour l’essentiel d’entre elles par la même banque, Paribas.
« L’équipement du Maroc, ne peut être mis en balance pour documenter des bienfaits de la colonisation : loin d’être un don de la métropole, il est avant tout engagé pour le compte de groupes privés, qui recherchent avant tout la rentabilité de leurs activités. Le développement des infrastructures pendant le protectorat est ainsi une manifestation de la violence coloniale : elle contraint le pays à un développement déséquilibré et à une intégration brutale à l’économie mondiale », écrit Barbe, réfutant ainsi cet argument souvent avancé par les défenseurs du « rôle positif » de la colonisation : « [Le colonisateur] a pris, mais je veux dire avec respect qu’il a aussi donné. Il a construit des ponts, des routes, des hôpitaux, des dispensaires, des écoles. Il a rendu fécondes des terres vierges, il a donné sa peine, son travail, son savoir ».
Une assertion qui s’avère fausse comme le démontre le chercheur dans la deuxième partie de son livre consacrée à la politique de la dette au Maroc durant le protectorat et à la domination exercée notamment par la banque Paribas sur tous les secteurs vitaux de l’économie marocaine.
Le paradoxe de la dette marocaine
Adam Barbe commence d’abord par expliquer les causes qui ont conduit au surendettement marocain à partir de 1912. Il relève ainsi un grand paradoxe : durant toute la période du protectorat, le budget du gouvernement marocain n’était pas déficitaire. Il était même souvent excédentaire, note-t-il. Mais le ratio de la dette par rapport au PIB qui était de 30% au début du protectorat est passé à 40% en 1923 avant d’exploser à 70% en 1935.
« Cette dette est inhabituelle du fait de ses origines : elle n’est pas due à l’accumulation sur plusieurs années de déficits budgétaires. Au contraire, le Maroc a dégagé la plupart du temps des excédents budgétaires : le pays a maintenu un excédent pendant 32 années sur les 41 années pour lesquelles des données sont disponibles. Ces surplus finançaient alors un fonds de réserve dédié aux dépenses d’investissement. La dette marocaine peut ainsi être considérée comme « importée » : elle a été accumulée à travers une succession d’emprunts français qui n’étaient pas nécessaires d’un point de vue budgétaire », analyse l’auteur.
Pourquoi donc le Maroc continuait de s’endetter alors que ses comptes publics sont à l’équilibre, voire excédentaires ? Les raisons de l’envolée de la dette publique sont à chercher ailleurs selon Barbe : dans le déséquilibre structurel de sa balance commerciale, que la France a tout fait pour maintenir en l’état. Un déficit qui justifiait le recours à des emprunts étrangers qui n’étaient pas nécessaires d’un point de vue budgétaire, mais dont la seule utilité était d’équilibrer le trou des échanges commerciaux du Maroc avec le reste du monde. Un trou alimenté par une politique française volontariste, qui a empêché toute tentative d’industrialisation du Maroc. Comme ce fut le cas en Algérie également, note l’auteur :
« Si le Maroc et l’Algérie diffèrent par le lien commercial qui les unit à la France, ils se rejoignent dans la constance de leur déficit commercial hors période de guerre. Ce déficit est caractéristique du pacte « colonial » tel que défini par Saul (2016). Dans les deux pays, les exportations françaises sont constituées de produits finis tandis que les exportations algéro-marocaines sont composées de biens primaires : le centre produit des biens manufacturés et les exporte à la périphérie, qui en retour lui fournit des biens agricoles et des matières premières. Le pacte « colonial » prévient ainsi tout développement industriel en minant tout effort de créer de la valeur ajoutée exportable sur les territoires colonisés. Le déficit commercial est l’incarnation statistique du déséquilibre généré par la relation coloniale… », explique Adam Barbe.
Le déficit de la balance commercial doit être donc vu comme un signe de supériorité et de domination commerciale et économique. Mais en même temps comme un prétexte pour permettre aux banques françaises de prêter de l’argent au gouvernement marocain, qui se voit de fait obligé de lever des dettes étrangères pour combler le trou de sa balance.
« Les emprunts contribuent toujours à compenser environ un quart de ce déficit. Les dépenses militaires jouent de loin le rôle le plus important, compensant plus de la moitié du déficit de la balance commerciale. Il est intéressant de noter que celles-ci ne sont pas exclusivement françaises : 30% ont une origine étrangère, probablement américaine. Il est ironique de constater que les capitaux compensant le déficit commercial du Maroc, qui ont par le passé été interprétés comme de l’aide au développement, sont en réalité en grande partie dus à des dépenses militaires », précise l’auteur qui apporte ici un autre éclairage sur les flux financiers entre métropole et pays colonisés.
Qu’est-ce que cette dette a financé ?
En étudiant l’affectation des emprunts contractés par le Maroc durant le protectorat, Adam Barbe tire une conclusion assez choquante, mais qui reste d’actualité, montrant que l’essentiel des dépenses effectuées à l’époque étaient tournées vers les infrastructures au détriment du développement du capital humain et des secteurs sociaux comme l’éducation et la santé : « Plus de 70% des emprunts devaient ainsi financer des dépenses relatives aux travaux et aux communications (Postes, télégraphes et téléphones) alors que moins de 10% du total est consacré à l’éducation et à la santé ». Idem pour les dépenses d’investissement de l’Etat dont « une part de 70% vont aux travaux publics, et une part toujours aussi faible est consacrée à l’investissement dans le capital humain (santé et éducation) ».
« Ce déséquilibre ne pouvait être que difficilement compensé par le budget ordinaire, bien trop faible pour développer un embryon d’État-providence, et déjà largement amputé par le service de la dette », signale Adam Barbe.
Autre donnée mise en lumière par le chercheur : tous les emprunts n’ont pas été contractés par l’État marocain de manière directe. « Entre un quart et la moitié de la dette marocaine est constituée d’emprunts destinés aux entreprises chargées d’équiper le pays, le reste des emprunts ayant été directement émis pour le gouvernement marocain », note Barbe.
Le hic, c’est que même la dette portée par les entreprises privées était garantie par l’Etat marocain. Des emprunts destinés souvent, comme le montre l’auteur, à des entreprises ayant pour mission de bâtir les infrastructures du pays, à l’instar de la Société d’énergie électrique du Maroc (devenue ONE après l’indépendance), de la Compagnie des chemins de fer du Maroc (l’actuel ONCF) ainsi que d’autres compagnies agissant dans les secteurs des ports, des mines, de l’industrie, des travaux publics…
« La stratégie de colonisation française semble à priori rationnelle. Elle vise à faire reposer autant que possible les investissements nécessaires à l’équipement du Maroc sur les emprunts. De fait, le capital français est immédiatement disponible, alors que le système fiscal marocain est plus lent à s’établir et à se pérenniser : c’est l’importance encore relativement faible de l’État dans l’économie qui contraint à financer une politique d’investissements publics ambitieuse par la voie de l’endettement. Or il est plus avantageux d’investir dans une colonie le plus tôt possible pour espérer des retours dans un horizon temporel raisonnable. Le service de la dette étale alors sur plusieurs décennies le paiement avec intérêts par le Maroc des investissements que réalise la France sur son territoire. Il est ainsi important de comprendre que les investissements massifs que la France réalise au Maroc devaient être en fin de compte payés par les Marocains », écrit l’auteur.
Paribas, la banque qui contrôlait le Maroc
Dans un chapitre du livre, Adam Barbe démontre que le plus grand bénéficiaire de cette politique de la dette et d’équipement du Maroc n’est autre que la banque Paribas, à l’origine des emprunts de 1904 et de 1910 qui ont conduit au Protectorat.
En plus de piloter l’émission des emprunts depuis la Banque d’Etat du Maroc (l’actuelle Bank Al-Maghrib) qu’elle contrôle, l’argent est attribué à des entreprises que la banque française contrôle également à travers Génaroc, un groupe tentaculaire présent dans tous les secteurs vitaux de l’économie marocaine.
Un double contrôle des flux entrants et sortants qui assure à la banque une domination presque totale sur l’économie du pays et la gestion de ses finances.
Premier axe de cette influence, le contrôle exercé sur la Banque d’Etat du Maroc que Adam Barbe explicite dans ce passage :
« La BEM est créée en tant qu’établissement de droit marocain dont le capital est sous contrôle international et dans lequel les pays signataires d’Algésiras ont des droits égaux. Chaque gouvernement assignant à une banque de son choix la gestion de ses parts, c’est Paribas qui contrôle les possessions françaises au sein de la BEM : sur les quatorze membres du conseil d’administration de la BEM, huit sont nommés par Paribas. Le Président de la BEM est dans ces circonstances systématiquement nommé par Paribas : à la création de la BEM, c’est Léopold Renouard, vice-Président de Paribas, qui prend la tête de la BEM. Bien plus tard, entre 1945 et 1955, le président de la BEM n’est autre qu’Émile Oudot, administrateur chez Paribas. Son successeur à la BEM, Henri Deroy, est également un ancien administrateur de la banque avant de devenir le Président de Paribas entre 1962 et 1966. La BEM devient alors le symbole de la puissance et de l’influence de Paribas au Maroc : c’est par ce canal que Paribas a accès à toutes les informations pertinentes pour son activité, qu’elle se constitue un puissant réseau et qu’elle contrôle le financement de l’économie marocaine ».
« En tant que banque centrale, la BEM a le pouvoir d’émettre la monnaie marocaine et assure la fonction de trésorier-payeur du pays. A partir du 1921, c’est elle qui gère le compte d’opérations que le Maroc détient auprès du Trésor français. Elle ne détient toutefois pas la totalité des attributs d’une banque centrale : elle n’assure pas le rôle de prêteur en dernier ressort et ne peut créditer les autres banques commerciales. Le statut de la BEM est en réalité hybride, puisqu’elle demeure une banque commerciale dont l’objectif principal est de générer des profits au bénéfice de ses actionnaires. Rôle qu’elle a assumé avec constance. Sa valeur de marché tout comme sa rentabilité sont impressionnantes. En 1955, la BEM était cotée à 4 620 000 000 de francs, soit 100 fois la valeur de son capital nominal. La BEM ne se contentait donc pas seulement d’être le garant de l’influence de Paribas au Maroc : elle générait également des profits substantiels », raconte Adam Barbe.
Deuxième instrument de contrôle par Paribas de l’économie marocaine : la présence de la banque dans le capital de tout ce que compte le pays comme grandes entreprises. Une présence « invisible », note l’auteur, puisque avant l’année 1950, il n’existait aucune mention de Paribas au Maroc et le groupe n’y possédait aucun bureau, révèle-t-il. « Le pouvoir de Paribas est en réalité transitif : il s’exerce à travers un jeu de participations financières au centre duquel se trouve la société de portefeuille Génaroc », précise Adam Barbe.
Bras armé de Paribas au Maroc, le groupe Génaroc est fondé le 12 février 1912, un mois avant l’instauration officielle du protectorat. Il est pensé dès sa création, comme le raconte l’auteur, pour être la principale organisation à travers laquelle Paribas pourra investir dans la nouvelle colonie française. Son portefeuille compte tous les fleurons de l’économie marocaine dans les chemins de fer, le portuaire, les travaux publics, l’assurance, l’immobilier, les mines, les hydrocarbures, la presse, l’agriculture, le commerce, la distribution, le transport…
Une des entreprises emblématiques contrôlés par Paribas n’est autre que la holding ONA. Créée en 1934 par le fondateur de l’actuelle CTM, l’homme d’affaires Jean Epinat, pour réunir ses participations dans le secteur minier, l’ONA tombe sous le contrôle de Paribas entre 1950 et 1953. La holding compte alors plus d’une vingtaine d’entreprises dans son portefeuille et est considérée comme un acteur clé de l’économie marocaine. Rôle qu’elle continuera de jouer même après l’indépendance en devenant la plus grande entreprise privée du pays. Paribas ne lâchera son contrôle qu’en 1980 après le rachat de la part de la banque par Feu Hassan II…
« La dette a durablement modifié l’équilibre des pouvoirs économiques au Maroc au profit de ceux qui ont mené l’offensive financière. Paribas en émettant l’important emprunt de 1904, s’assure une place de choix au Maroc en dirigeant la BEM, Génaroc et quelques-unes des principales entreprises du pays (…) Ce nouvel équilibre des pouvoirs économiques influe en retour sur l’évolution du niveau de la dette marocaine. De fait, l’institution en charge de l’émission de la dette marocaine tout comme les principaux bénéficiaires des emprunts marocains, font partie du groupe Paribas », signale Adam Barbe dans la fin d’un chapitre qu’il a entièrement réservé au rôle joué par cette banque française aussi bien dans l’instauration du protectorat que dans le façonnage des politiques économiques du Maroc.

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